2015 Solitaire du Figaro – Vers un enfer à Antifer ?

by Solitaire du Figaro on 25 Jun 2015 2015 Solitaire du Figaro – Les cerveaux des 38 skippers fument depuis le passage d’Owers tôt ce matin. Que va-t-il se passer dans la zone d’Antifer, et après jusqu’à Dieppe ? Une cellule anticyclonique se balade le long de la côte d’Albâtre pouvant complètement remettre en jeu l’ordre hiérarchique qui s’est installé en Manche aujourd’hui. Une hiérarchie un peu branlante cependant. Adrien Hardy (Agir Recouvrement) et Xavier Macaire (Skipper Hérault) se tiennent sur 400 mètres et Yann Eliès (Groupe Queguiner – Lecuémie Espoir) revient comme une balle sur Charlie Dalin (Skipper Macif 2015). Le chronomètre est lancé sur ces derniers milles : qui va gagner la 46e édition de La Solitaire du Figaro – Eric Bompard cachemire ?

« On ne peut rien prédire maintenant, on verra à l’arrivée… » confiait cet après-midi Xavier Macaire (Skipper Hérault). Si le vent, même mollasson, n’a pas joué les trouble-fêtes sur la traversée de La Manche, le pire est à venir. Météo Consult prévoit 2 à 6 nœuds, parfois moins, et variables en direction. Cette fin de course pourrait bien redonner un nouveau départ. Et pour les ETA, il faudra patienter ! Les marins s’apprêtent à passer une quatrième nuit en mer, une nuit blanche à coup sûr. Adrien Hardy (Agir Recouvrement) ne laissera certainement pas passer sa chance de gagner cette dernière étape, après un début d’épreuve en demie teinte. Epuisé, le skipper d’Agir Recouvrement tiendra bon la barre malgré un Skipper Hérault en meilleure forme et qui n’en finit pas de le pousser dans ses retranchements.

Guerre des nerfs
Une dernière étape passionnante à suivre à terre ou embarqué sur le catamaran de la direction de course, mais Ô combien stressante pour les figaristes qui jouent leur dernier ticket, celui de l’ultime chance. Et ils sont nombreux à vouloir le podium ou à espérer rentrer dans le top 5. Depuis Le premier passage à Longship, Yann Eliès reste muet : ne pas déranger ! Le double vainqueur de La Solitaire du Figaro-Eric Bompard cachemire (2012 et 2013) est venu pour la victoire et sur cette étape finale, l’affaire fut compliquée. Compétiteur dans l’âme, le Briochin est revenu dans le match… dans le tableau arrière de son dauphin au classement général, Charlie Dalin. 22 minutes séparent Yann de Charlie, 57 minutes Yann de Xavier… alors évidemment les intéressés commencent à faire les comptes, même si tout peut encore arriver.

Au temps, emporte le vent…
A 16h44mn et 58 secondes, Adrien Hardy doublait en tête la marque A8 obligatoire distante de 47 milles de Dieppe. 2 minutes 30 après, passait Xavier Macaire. Comprenez qu’avec ce vent de 6 nœuds, un petit écart peut signifier beaucoup. Devant le cap d’Antifer, les bateaux glissent lentement sous spi bâbords amures… courant dans le nez. Une fin de parcours éreintante et diablement exigeante.

Ils ont dit :

Adrien Hardy (Agir Recouvrement)
« Ca va bien, Xavier Macaire (Skipper Hérault) est revenu pas mal. On contrôle, nous sommes bord à bord, il est sur le pont là, à la barre. Le vent va finir par mollir à Antifer, la renverse de marée est prévue dans une heure et demie. On est au près serré, il faudra peut-être tirer des contre-bords. Certains bateaux pourront monter vers Dieppe avec le courant. Nous avons des prévisions de vent très faibles. Ce sera plus ou moins la route directe, il n’y aura pas grand-chose à faire. C’est sympa de naviguer avec Xavier, il va vite. On a perdu un peu par rapport à Vincent Biarnès (Guyot Environnement) et Benjamin Dutreux (Team Vendée) et là visuellement, je ne vois plus l’autre groupe à l’AIS, on a un peu d’avance sur ce paquet et c’est pas plus mal pour la fin. On se parle rarement à la VHF, moi je ne parle pas trop ni Xavier, l’ambiance ne change donc pas beaucoup. La tension monte. On a déjà fait une arrivée comme cela à Dieppe avec Xavier et Yann Eliès (Groupe Quéguiner - Leucémie Espoir). Xavier est plus à l’aise que moi en vitesse. On refait le match d’il y a deux ans. »

Isabelle JOSCHKE (Generali - Horizon Mixité)
« Je pense que la fin va être difficile avec très peu de vent, ça peut mettre du temps et ça peut nous mettre des heures à l’arrivée. Il faut se reposer tant que les bateaux avancent car il peut se passer pleins de choses, j’essaie de me préparer à éventuellement vivre un nouveau départ et en tout cas des heures difficiles, on peut perdre beaucoup ou gagner ! Comme à Start Point, oui c’est possible après ça peut aussi être l’inverse, ça peut faire l’élastique en fonction de l’heure à laquelle on arrive. En fonction du courant, il peut y avoir un gros regroupement le long des falaises à Fécamp. Les deux schémas peuvent arriver, il faut être prêt à tout ! En ce qui me concerne, dans un premier temps je vais au maximum faire une course vitesse, ce n’est pas exclu qu’il faille faire un choix tactique, et comme souvent dans les choix il faut y aller à fond ! Là, on a une situation qui est vraiment complexe, car le centre anticyclonique et la dorsale se promènent, les éléments sur lesquels on se fie souvent sont le vent, sa force, sa direction. Le vent situe l’anticyclone, avec la direction on sait où on est, mais très honnêtement on n’en sait pas plus. Ce qui est sûr c’est que d’anticiper le mouvement de la dorsale ou l’anticyclone ce n’est pas facile. On va subir, il va falloir être opportuniste. Plus le baromètre monte, plus on rentre dans la dorsale, plus il descend, plus on en sort. Il va falloir avoir du nez et trouver des risées, c’est possible qu’on ne comprenne pas ce qu’il se passe. La mer est plate, il n’y a pas de vague c’est très agréable de naviguer, le bateau file au près, il y a 9 nœuds de vent. J’ai autour de moi, les concurrents qui me poursuivaient à Owers, Martin Le Pape (Ovimpex - Secours Populaire), Gwénolé Gahinet (Safran - Guy Cotten) et toute une troupe de bateaux que je tente de rattraper et surtout plein de cargos ! Je suis à l’est de l’entrée du rail. Quand je me suis réveillée, je croisais tout près d’un cargo qui s’appelait Isa, c’est drôle ! C’est calme mais il y a de l’activité ! Je ne mets pas tout le temps l’AIS, car l’alarme sonne tout le temps, c’est pénible. Là, je ne l’avais pas mis et je me suis réveillé à temps ! Pour la fin de course, je sens très bien Xavier Macaire (Skipper Hérault) et Adrien Hardy (Agir Recouvrement) ils sont pleins de hargne ! »

Gildas Morvan (Cercle Vert)
« On va avoir des calmes donc il faut essayer de bien naviguer et se reposer un peu pour récupérer, pour être prêt à attaquer quand ça va mollir. J’ai réussi à dormir, le bateau est bien calé et la mer est plate, on est fatigué. Je vois autour de moi Isabelle Joschke (Generali Horizon Mixité), Arnaud Godart Philippe (FAUN Environnement - Afrikarchi) et Martin Le Pape (Ovimpex - Secours Populaire). Je ne sais pas ce que ça va donner. C’est délicat. On prévoit 2 à 4 nœuds donc un vent très faible. Ca va être long d’Antifer jusqu’à la fin. On va être vent-arrière, avec des angles ouverts, on va devoir aller chercher des risées. Avec le courant qui est assez fort, il va y avoir du boulot, ça va être assez sport ! Je pense que nous arriverons dans la matinée. »

Tolga Ekrem Pamir (1 jour 1 homme 1 arbre)
« Tout va bien à bord, j’essaie d’avancer. Je suis avec Rob Bunce (Artemis 37) et Yannick Evenou (Loi et Vin) donc j’essaie de finir le parcours avec eux. Je n’ai pas vraiment regardé la météo mais je pense que la pétole nous attend. L’objectif est d’arriver à Dieppe et de finir cette belle course, cette belle aventure. C’est pour moi déjà une belle réussite. Au début de la course je ne m’attendais pas à autant de premières nuits musclées, j’ai perdu pas mal de places à cause du courant qui est pour moi l’inconnu. Je vais devoir travailler le passage des points délicats. Je me suis demandé une seule fois si cela serait ma première ou dernière Solitaire mais il reste plein de choses à apprendre. Elle est belle cette course même si elle est compliquée. C’est bien parti je pense pour Xavier Macaire (Skipper Hérault). »